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Dans « A son image », Thierry de Peretti filme une jeune femme projetée par amour dans la lutte armée

L’AVIS DU « MONDE » – À NE PAS MANQUER
Thierry de Peretti, homme de théâtre passé au cinéma, natif d’Ajaccio en 1970, revient à la saga corse qui avait occupé ses deux premiers longs-métrages, Les Apaches (2013) et Une vie violente (2017), après un crochet par le polar d’atmosphère imprégné de politique-fiction qu’était Enquête sur un scandale d’Etat (2022). Inspiré du roman éponyme de son « compatriote » Jérôme Ferrari, A son image (Actes Sud, 2018), passé en mai par la Quinzaine des cinéastes à Cannes, fait un retour sur la période des années 1980-1990 déjà décrite dans Une vie violente, concernant la dérive des mouvements indépendantistes corses vers la lutte armée, les rivalités intestines, les vendettas en pagaille et le banditisme. A cette séquence historique, A son image appose un contrechamp féminin, s’attachant à l’itinéraire d’une jeune compagne de militant, prise par amour interposé au cœur de la tourmente.
Le film commence très fort, en l’occurrence par la fin, inscrivant en exergue la mort fortuite de son héroïne dans un accident de voiture, une terrible sortie de route à partir de quoi tout le reste sera raconté, non sans d’emblée un poignant sentiment de gâchis. Au début des années 1980, Antonia (Clara-Maria Laredo) sortait de l’adolescence en tâtonnant, intriguée par les photos de famille, apprenant à manipuler l’appareil argentique, et se dénichant bientôt un emploi de photographe à Corse-Matin.
Dans le même temps, elle tombe amoureuse d’un certain Pascal (Louis Starace), port altier et longue chevelure ondulée, militant nationaliste autour duquel gravite toute une bande de copains et copines du même âge, animés par la cause. C’est la période de l’affaire Bastelica-Fesch (prise d’otage de trois barbouzes), du double homicide du 6 juin 1984 dans la prison d’Ajaccio et autres opérations commandos. A chaque fois, Pascal, impliqué, tombe et passe des séjours successifs en prison, tandis qu’Antonia subit ses intermittences, réduite malgré elle à son rôle de « femme de », ramenée à la communauté des épouses patientes. Un rôle auquel elle finira par se refuser énergiquement, comme à l’étroitesse désolante de ses sujets pour la presse régionale, en partant sur un coup de tête pour un reportage de guerre sur un autre front, en ex-Yougoslavie.
En dressant ce portrait sur une durée de vingt ans, Thierry de Peretti trouve une façon de ne pas raconter trop directement l’histoire corse récente, avec tout ce que cela impliquerait d’artifices fictionnels. A son image décrit plutôt un pas de côté, ne donnant à percevoir cette séquence de lutte armée qu’à travers ses répercussions sur la vie intime de son héroïne. C’est la première beauté du film : se placer, non pas au cœur des événements, mais juste à côté, dans cette sphère existentielle qui en reçoit l’écho tout en gardant un pied dans le quotidien.
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